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Par Elizabeth Gasiorowski Denis
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William Amwayi Omukhweso vient d’un milieu modeste d’une région rurale du Kenya. Avec beaucoup de travail et de détermination, il a bravé les obstacles et s’est hissé au sommet, sans fléchir sous l’effort. Aujourd’hui, à l’âge de 30 ans, William est Responsable, Assurance de la qualité, au Kenya Bureau of Standards (KEBS) et le lauréat du Concours d’essais ISO/DIN pour les jeunes normalisateurs dans les pays en développement. William nous livre ici le témoignage de son parcours.

Lorsque William passe me voir dans mon bureau pour une entrevue informelle, c’est avec une décontraction apparente qu’il me salue amicalement, un iPad à la main. Il a un costume taillé pour le succès et porte une chemise stricte à manches longues qui sied bien à sa fonction de Responsable, Assurance de la qualité, au Kenya Bureau of Standards (KEBS), le membre de l’ISO pour le pays.

William me dit son immense fierté de contribuer à l’économie de son pays. « C’est pour moi une source de satisfaction que de voir à quel point les fabricants kenyans reconnaissent l’utilité des normes dans le contexte économique actuel, comme un moyen de rendre leurs produits plus compétitifs, non seulement au niveau local, mais également au niveau international. »

William est le lauréat du Concours d’essais ISO/DIN 2012 pour les jeunes normalisateurs dans les pays en développement. Son essai sur le rôle des normes dans l’économie kenyane a, selon M. Torsten Bahke, Directeur du DIN, très bien établi le lien entre les objectifs de développement que le Kenya a énoncés dans son programme économique national « Vision 2030 » et la nécessité de mettre en œuvre des Normes internationales dans les secteurs qui présentent des perspectives de croissance, en particulier sur les marchés d’exportation.

Au fil de notre conversation, entrecoupée d’évocations de son enfance, William fait preuve d’aisance et de pondération. Il est né le 6 février 1983 dans l’ouest du Kenya et a appris très tôt la valeur du travail. Sa mère s’occupait du foyer et son père était instituteur.


La localité dans laquelle vivait la famille, le district de Khwisero, était connue pour être très pauvre. Selon le rapport sur l’inégalité de la Société internationale pour le développement (SID), 64 % de la population du Khwisero vit en dessous du seuil de pauvreté. Les habitants de cette région vivent essentiellement d’une agriculture de subsistance fondée sur la culture du maïs, des haricots et des bananes destinée à leur consommation personnelle.

Le simple fait de gagner sa vie peut être difficile et les personnes qui ont la chance d’avoir un « travail régulier » doivent elles aussi souvent effectuer de longs trajets, tard dans la nuit, pour rentrer chez elles et soutenir leur famille. William fut l’une de ces personnes.

L’adolescence fut un moment intense dans l’existence de William. Il se heurta souvent à sa mère, qu’il jugeait un peu trop autoritaire. Au collège, les exigences scolaires et la discipline stricte furent également une source de stress. Ce fut, comme l’on peut s’y attendre, une période émaillée de sentiments contradictoires, chargée d’espoirs et de craintes, remplie de joies et de tourments, de découvertes et de confusion, de ruptures avec le passé et de transitions vers l’avenir.

Je demande à William d’imaginer le conseil qu’il se donnerait, s’il redevenait un enfant. Il répond sans hésiter : « faire de l’excellence une habitude (pour reprendre la devise du British Standards Institution), et valoriser le travail. Ne dit-on pas que seul le travail paie ? »

À 30 ans seulement, William est confiant. Il est reconnaissant envers sa mère et son père pour le soutien qu’ils lui ont apporté, même si, pendant son enfance, ils se sont montrés « fermes » pour son bien. Ils lui ont transmis le sens des responsabilités et l’aptitude à travailler avec les autres. Ainsi épaulé, William a persévéré et ses efforts sans relâche ont finalement été récompensés. L’obtention de son diplôme universitaire en 2007 a marqué pour lui un nouveau départ. Il a alors pu saisir sa chance. Les portes ont commencé à s’ouvrir et les normes n’ont pas tardé à l’appeler.

Lorsque je demande à William comment il en est venu à la normalisation, il joint les mains et s’exclame en riant : « Pure coïncidence ! Après l’obtention de mon diplôme, le KEBS avait fait paraître une annonce pour un Spécialiste en production animale. J’ai postulé, été invité à un entretien et obtenu le poste. Je n’avais alors qu’une idée vague des normes. »

Aujourd’hui, William est intarissable sur la question. Il explique comment les normes permettent aux entreprises d’améliorer leur efficacité, d’augmenter leur productivité et d’accéder à de nouveaux marchés. Il souligne que la nourriture que nous consommons doit se conformer à des normes, qu’il en va de même des médicaments que nous prenons, des véhicules que nous conduisons – voitures ou vélos – dont les pièces sont normalisées et par conséquent interchangeables, ou encore des téléphones qui doivent se conformer à des interfaces normalisées. « Pour n’importe quel exemple, nous avons une norme. Même les draps dans lesquels nous dormons doivent être normalisés afin de s’adapter aux tailles de nos matelas. »

Alors que notre entretien touche à sa fin, je demande à William quelles sont ses ambitions futures : la normalisation est-elle un tremplin vers une autre carrière ou une fin en soi ?

« Il faut avoir des buts dans l’existence, me dit-il. Vivre sans but, c’est comme errer dans l’obscurité. Les normes me passionnent. Dans les pays en développement, elles passent généralement inaperçues. Elles y sont essentiellement vues comme des forces silencieuses et invisibles. La question de savoir d’où elles viennent reste un mystère pour le plus grand nombre. »

Ne dit-on pas que seul le travail paie ?

William aimerait, avant l’âge de 40 ans, avoir marqué le monde de la normalisation dans le seul but de faire entendre l’appel à l’action, avec force, insistance, constance et clarté. Pour le jeune Kenyan, les pays en développement doivent certes jouer un rôle de premier plan pour l’élaboration des Normes internationales, mais ils doivent aussi assumer une plus grande responsabilité lorsqu’il s’agit d’influer sur le processus de normalisation.


« La normalisation a beaucoup à offrir. C’est le seul secteur ouvert à tous, quelle que soit la profession que l’on exerce. J’aimerais encourager les jeunes à se plonger dans l’univers des normes. C’est une immersion qu’ils ne regretteront pas. »

Je demande à William quelle est la clé de son succès. Il se tait et regarde un instant par la fenêtre qui donne sur mon bureau. « Le succès n’est pas dans les « gènes ». Il se gagne. L’une de mes citations favorites vient de Thomas Edison. Elle résume parfaitement cette idée : « Le succès, c’est un pourcent d’inspiration, 99 % de transpiration. » C’est en apportant tous les jours sa petite pierre à l’édifice que nous bâtissons le succès. »

Cette considération nous ramène à la question du premier salaire de William : l’a-t-il dépensé pour s’offrir quelque futilité ? Ou bien a-t-il judicieusement utilisé cette somme pour rembourser par exemple ses emprunts ? La réponse de William est assez surprenante, et témoigne une fois encore de l’éducation humble et rigoureuse qu’il a reçue : « Nous avons une tradition intéressante dans notre famille, le premier salaire revient aux parents ! »

J’aimerais demander à William de développer mais je m’en abstiens, bien consciente qu’il est préférable parfois de faire preuve de discrétion. Alors que nous nous serrons la main, William se penche et me regarde en souriant. Il s’apprête à dire quelque chose, mais s’arrête.


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Elizabeth Gasiorowski-Denis

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